LE PRINCIPE DE LA RESPONSABILITÉ PERSONNELLE

Auteur: Pierre Welter

En Europe, nous vivons objectivement à l’époque la plus « libre », mais nous avons parfois l’impression qu’une grande partie de notre vie n’est pas portée par la « liberté ». La liberté n’est-elle en fin de compte qu’un mot vide de sens? Et, qu’en est-il de la « responsabilité personnelle » ? Ce n’est que dans la liberté que la responsabilité personnelle prend tout son sens.  

Ce que le mot « responsabilité personnelle » implique exactement n’est presque jamais dit. De quoi s’agit-il donc ?

La responsabilité personnelle réside dans le libre arbitre

Le libre arbitre : il n’est pas à faire valoir devant la raison, mais il faut pourtant le revendiquer, sinon toute responsabilité individuelle prend fin. Wilhelm Busch (1832 – 1908), dessinateur, peintre et écrivain allemand. Effectivement, de nombreuses décisions prises par l’homme ne peuvent être ni expliquées ni comprises par la raison, généralement même pas par celui qui les a prises. Est-ce la tête qui a décidé, le ventre — ou bien le libre arbitre ?

On parle de nouveau beaucoup des « valeurs occidentales ». Mais lesquelles ? En raison de la guerre en Ukraine, le terme de « valeur » est actuellement constamment utilisé en politique : dans la presse, dans les débats, dans les éditoriaux, dans les talk-shows. Les mots les plus utilisés sont « liberté », « démocratie » et « droits de l’homme ». Des mots dont nous sommes fiers et que nous sommes prêts à défendre par tous les moyens.  Le mot « responsabilité individuelle » est également largement utilisé. Souvent, nombreux sont ceux pour qui ce mot suscite des craintes et des résistances ou les dépasse. Mais, il faut d’abord s’interroger sur la signification de la « responsabilité individuelle ». En tout cas, si l’on prend au sérieux ce beau mot de « responsabilité individuelle ».

Pour mener une vie autodéterminée et consciente, il est important de reconnaître que nous sommes les seuls responsables de notre vie. Mais, si, comme nous le disons, la « responsabilité individuelle » est aussi cruciale pour nous, comme orientation des valeurs dans la vie, dans quelle mesure voulons-nous l’assumer et nous libérer de la toute-puissance de l’État ? Question : « Quel type de société préférez-vous pour le Grand-Duché du Luxembourg : une société dans laquelle l’État est principalement responsable de ses citoyens ou une société dans laquelle chaque citoyen essaie de résoudre autant de problèmes que possible pour lui-même ? »

Là où l’autorité et le pouvoir pourrissent et où l’on fait du système juridique un spectacle cynique, l’auteur pense qu’il faut toujours commencer par essayer de s’aider soi-même. Il ne pense pas à l’égoïsme. Cela ne signifie pas pour autant que chacun regarde pour soi et que le plus fort s’impose. La responsabilité individuelle et la justice sociale ne s’excluent pas mutuellement, loin de là. Comme finalement, pour la majorité des personnes, la justice sociale ne se réalise justement pas en les déresponsabilisant, mais en les incitant à s’occuper d’elles-mêmes. Ces points de vue sur un transfert de la responsabilité de la garantie du bien-être de l’État luxembourgeois vers l’individu constituent en même temps une invitation aux institutions de l’État à créer les possibilités correspondantes. 

Au fond, il s’agit d’un problème de démocratie. Aucune justice n’est durable sans un système juridique démocratique.  Mais, un système juridique peut devenir incontrôlable et constituer une menace pour la justice. Le système juridique ne peut être appelé juste que s’il assume sa propre responsabilité et s’il compense les souffrances causées par des pandémies, des guerres, une forte inflation, la décadence, le déclin, l’injustice, la déchéance et la dépravation. Dans le cas contraire, le système juridique est tout simplement immoral. Si l’on veut se responsabiliser, il faut d’abord accepter le cadre et les conflits au sein de la démocratie. Comme la démocratie ne tombe pas du ciel. La démocratie implique la responsabilité personnelle.  La qualité de la responsabilité personnelle détermine la qualité de notre avenir.

Si la responsabilité individuelle régnait, les lois seraient superflues

La manière dont les êtres humains gèrent les crises et les défis est très variable. La majorité d’entre eux sont disposés à assumer davantage de « responsabilité personnelle » en matière de prospérité. 

La plupart comptent la consommation parmi les valeurs occidentales. Chacun devrait toutefois être conscient que celle-ci est rarement gratuite et qu’elle a une connotation financière évidente en tant que valeur ???. Il s’agit de la valeur monétaire. La « responsabilité individuelle » ou les « droits de l’homme » n’ont pas cette valeur. On ne peut pas acheter la « responsabilité individuelle » et encore moins les « droits de l’homme ». Cela nous incite à faire preuve de plus de doigté — même dans les questions domestiques de « responsabilité individuelle ».

L’être humain ne se caractérise pas par un « être ainsi » de facto, mais par ce qu’il fait de lui-même en pensant et en agissant. La pandémie de la COVID-19 et la guerre en Ukraine, la forte inflation, la catastrophe climatique et le malaise général dans la société contribuent à ce que de nombreuses personnes soient radicalement renvoyées à elles-mêmes et se retrouvent ainsi souvent dans des situations extrêmes. „Als Grenzsituationen werden nun solche definiert, die unausweichlich zum Leben gehören: Situationen wie die, dass ich immer in Situationen bin, dass ich nicht ohne Kampf und ohne Leid leben kann, dass ich unvermeidlich Schuld auf mich nehme, dass ich sterben muss, nenne ich Grenzsituationen“ (Karl Jaspers 1956, 203). « Les situations limites sont désormais définies comme étant celles qui font inévitablement partie de la vie : J’appelle situations limites des situations telles que je suis toujours dans des situations, que je ne peux pas vivre sans lutte et sans souffrance, que je me charge inévitablement de culpabilité, que je dois mourir » (Karl Jaspers 1956, 203).

La responsabilité personnelle n’est qu’à une décision de toi

Entre-temps, un grand nombre de personnes angoissées ont une idée claire des réformes dont le Luxembourg aurait besoin pour un avenir prometteur : Parmi les mesures de réforme les plus souvent citées, beaucoup seraient liées à une plus grande liberté de décision et d’action des citoyens. Elles concernent les domaines de réforme dans lesquels des valeurs telles que l’égalité et la solidarité (communément appelée fraternité) sont particulièrement mises en avant. Elles exigent davantage de « responsabilité personnelle » et, en même temps, de décence, de droiture, de savoir-vivre et de convenance.

Les idées générales sur les réformes nécessaires, qui permettent plus de liberté et de flexibilité, ne doivent pas masquer les conflits d’objectifs possibles. Qui peuvent survenir lorsque l’individu est personnellement concerné L’auteur pense ici à la pensée égoïste de Saint-Florian. Dans ce qu’on appelle le « principe de Saint-Florian » se cache un constat très sobre : dans la plus grande détresse, l’homme n’est souvent le prochain que de lui-même. 

C’est pourquoi : chaque responsabilité personnelle n’est qu’à une décision de toi. Certaines se font attendre.  D’autres durent toute une vie.